Permis de conduire : ne pas perdre ses points en cas de procès-verbal « à la volée »

Bref rappel…

L’interpellation « à la volée » permet aux agents verbalisateurs de dresser procès-verbal sans interception du véhicule. De ce fait, il est permis de sanctionner la commission d’infractions de conducteurs non identifiés. Cela peut prendre la forme de constats directs par l’officier de police, vidéo-verbalisation ou radars homologués. L’agent relève ainsi la plaque d’immatriculation du véhicule et le procès-verbal est reçu quelques jours plus tard par le titulaire de la carte grise.

La liste des infractions relevant du champ d’application du procès-verbal sans arrêt est fixée limitativement par décret en Conseil d’Etat[1]. Cette pratique se multiplie en raison même du nombre d’infractions concernées. Depuis un décret du 17 septembre 2018, son champ a en effet été élargi. Sont ainsi visés :

  • Le port d’une ceinture de sécurité homologuée dès lors que le siège qu’il occupe en est équipé prévu à l’article R. 412-1 ;
  • L’usage du téléphone tenu en main ou le port à l’oreille de tout dispositif susceptible d’émettre du son prévus à l’article R. 412-6-1 ;
  • L’usage de voies et chaussées réservées à certaines catégories de véhicules, de voies vertes et d’aires piétonnes prévu au II de l’article R. 412-7 ;
  • L’arrêt, le stationnement ou la circulation sur les bandes d’arrêt d’urgence prévus à l’article R. 412-8, au 9° du II de l’article R. 417-10 et à l’article R. 421-7 ;
  • Le respect des distances de sécurité entre les véhicules prévu à l’article R. 412-12 ;
  • Le franchissement et le chevauchement des lignes continues prévus aux articles R. 412-19 et R. 412-22 ;
  • Le sens de la circulation ou les manœuvres interdites prévus aux articles R. 412-28 et R. 421-6 ;
  • Les signalisations imposant l’arrêt des véhicules prévues aux articles R. 412-30, R. 412-31 et R. 415-6 ;
  • Les vitesses maximales autorisées prévues aux articles R. 413-14, R. 413-14-1 et R. 413-17 ;
  • Le dépassement prévu aux articles R. 414-4, R. 414-6 et R. 414-16 ;
  • L’engagement dans une intersection ou dans l’espace compris entre les deux lignes d’arrêt prévu à l’article R. 415-2 ;
  • La priorité de passage à l’égard du piéton prévue à l’article R. 415-11 ;
  • L’obligation du port d’un casque homologué d’une motocyclette, d’un tricycle à moteur, d’un quadricycle à moteur ou d’un cyclomoteur prévue à l’article R. 431-1 ;
  • L’obligation, pour faire circuler un véhicule terrestre à moteur, d’être couvert par une assurance garantissant la responsabilité civile, prévue aux articles L. 211-1 et L. 211-2 du code des assurances et à l’article L. 324-2
  • Le port de plaques d’immatriculation dans les conditions prévues à l’article R. 317-8.

 

Vous n’êtes pas l’auteur de l’infraction reprochée?

Payer l’amende revient à reconnaitre que vous êtes l’auteur de l’infraction. Par conséquent, le paiement entraîne directement une perte de  points sur votre permis de conduire lorsque cela est prévu.

L’article A37-9 du Code de procédure pénale dispose d’ailleurs que « L’avis de contravention doit nécessairement mentionner que le paiement de l’amende forfaitaire entraîne reconnaissance de la réalité de l’infraction et réduction du nombre de points du permis de conduire » et ce pour informer le contrevenant des effets du paiement de l’amende.

On rappellera qu’en vertu de l’article 537 du Code de procédure pénale « Les procès-verbaux dressés par les agents de police font foi jusqu’à preuve contraire. » Il est important de préciser que le procès-verbal dressé sans interception du véhicule atteste que le contrevenant est bien le titulaire du certificat d’immatriculation mais non qu’il en ait été le conducteur au moment des faits. La Cour de cassation le rappelle d’ailleurs dans un arrêt du 29 mai 2013.[2]

Par conséquent, si vous n’étiez pas le conducteur au moment des faits et si vous ne souhaitez pas payer l’amende, il vous suffit de contester l’amende forfaitaire, ce que vous pouvez faire dans un délai de quarante-cinq jours à compter de l’envoi de l’avis de contravention ou de trente jours en cas d’amende forfaitaire majorée à compter de l’envoi de l’avis de contravention majoré.

La requête en exonération sera formée devant le ministère public.

Il s’agira simplement de démontrer que vous n’avez pas commis l’infraction (article L.121-3 du Code de la route).

Si vous ne contestez pas dans le délai imparti ou réglez l’amende, vous ne pourrez plus vous prévaloir des dispositions précédentes.

Il n’est, précision importante, absolument pas besoin de justifier de renseignements permettant d’identifier le véritable auteur de l’infraction. La Cour de cassation a d’ailleurs cassé un jugement du tribunal de proximité d’Ivry-Sur-Seine déclarant le prévenu redevable de l’amende au motif qu’il n’avait pas fourni de renseignements permettant d’identifier le véritable auteur de l’infraction. La juridiction ne s’était pas prononcée sur la valeur de l’attestation produite par le prévenu d’après laquelle il se trouvait sur son lieu de travail[3].

Attention tout de même, il est nécessaire d’étayer les raisons pour lesquelles il était impossible que vous soyez le conducteur au moment des faits. La simple dénonciation n’est pas suffisante, elle doit être corroborée par des éléments tangibles. De même, aucune obligation de délation n’est à votre charge si vous extirpez d’éléments probants justifiant le fait que vous n’étiez pas le conducteur.

Particularité

Avec la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle le représentant légal de la personne morale encourt lui l’infraction « de non divulgation du nom du salarié auteur d’une infraction routière » (Article L121-6 du Code de la route)

En somme, l’employeur qui ne dénoncerait pas, en l’absence de motif légitime, le véritable conducteur d’un véhicule de sa société qui a commis une contravention routière serait responsable pécuniairement de la contravention commise par ce salarié et encourrait donc une contravention de 4ème classe.

 

Quant à la condamnation pénale ?

Si le titulaire du certificat d’immatriculation est redevable du paiement de l’amende lorsqu’il ne démontre pas une des causes exonératoires vues précédemment, l’article L121-3 du Code de la route n’établit aucune présomption de responsabilité pénale à son encontre. Il ne fixe en réalité qu’une seule obligation pécuniaire.

La Cour de cassation le rappelle d’ailleurs dans un arrêt du 5 décembre 2007[4] en expliquant que : « le dispositif légal (L121-3) ne vise pas à engager la responsabilité pénale du titulaire du certificat d’immatriculation et déclarer ce dernier coupable au seul motif qu’il n’a pas prouvé son innocence, repose sur une présomption de responsabilité pénale. ».

Se trouvant, ce qui est particulièrement important et atypique en droit français,  hors du champ d’application de l’article L121-3 du Code de la route,  les juges devront donc prouver votre culpabilité sur le plan pénal pour prononcer le retrait de points de votre permis de conduire. En niant avoir commis l’infraction, vous ne pourrez pas être condamné sur le plan pénal. Seul le paiement de l’amende vous sera imputable si vous n’avez pas réussi à vous en exonérer.

La décision du juge prononçant le seul paiement de l’amende encourue n’entraînera donc en l’état actuel du droit, aucun retrait de points affectés au permis de conduire.

 

Pour conclure…

Si vous voulez à tout prix éviter le retrait de points lorsqu’il y a PV à la volée, c’est très simple : Il suffit de de former une contestation auprès du Ministère public dans les délais impartis, sans payer l’amende forfaitaire.

Si le ministère public renvoi devant la juridiction compétente et que vous parvenez à établir que vous n’êtes pas l’auteur de l’infraction, vous serez relaxé des faits qui vous sont reprochés.

Si vous n’y parvenez pas, vous pourrez être sanctionné à la condition que le magistrat prouve votre culpabilité.

Cette hypothèse cependant exclura inéluctablement le retrait de point et la seule sanction à subir sera pécuniaire.

A bon entendeur…

 

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[1] Article R121-6 du Code de la route

[2] Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 mai 2013, 12-85.303, Publié au bulletin

[3] Cour de cassation, Chambre criminelle, 9 février 2010, 09-85.641, Inédit

[4] Cour de cassation, Chambre criminelle, 5 décembre 2007 n°07-82.979

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